jeudi 11 mars 2010

Jardin botanique du Rayol



Un moment d'harmonie dans un monde de chaos ... Sur la commune du Rayol-Canayer, près du Lavandou, un jardin public pour découvrir la flore méditerranéenne à travers le monde (Afrique du sud, Amérique du sud etc.) et celle de la Côte d'Azur avant que celle-ci ne devienne une "conurbation" dopée au tourisme. On comprend pourquoi tant de gens ont aimé la côte dans les années 1900-1930 quand elle était encore un jardin d'Eden... Et on mesure à quoi on s'expose en développant sans réserve le tourisme de masse. Géré selon les principes du "Jardin en mouvement" de Gilles Clément, le Rayol est une propriété du Conservatoire du littoral. Pas d'herbicide, pas d'insecticide, économie d'eau, protection des sols, laisser les semences "bouger" selon les plans de la nature... Ne pas vouloir tout maîtriser !

mardi 9 mars 2010

Filature, identité et pacte social


Nicolas Baverez (Le Monde du 9 mars 2010 "La nouvelle question sociale" évoque, à propos de la crise en Islande, la "rupture du pacte social" "matérialisée par l'exil de la jeunesse vers le Danemark et la Norvège". La même situation est décrite par ailleurs en Irlande (renouveau de l'immigration). Dans certaines régions rurales françaises, notamment les Cévennes où je demeure, cette rupture est ancienne en constamment alimentée : même si les cours d'écoles sont davantage fréquentées depuis quelques années, les jeunes atteignant l'âge des études d'abord, du travail en suite, quittent en majorité la région géographique au sens "étroit". En fait ils ne vont pas forcément très loin mais la capacité d'emploi local, ou d'entrepreunariat local, est trop faible pour absorber les nouvelles générations. Quoi que : un taux de chômage moyen à 25 % chez les moins de 25 ans en France n'annonce rien de positif pour trouver de meilleures perspectives ailleurs.
Mais que deviennent ensuite ces régions dont les jeunes générations sont "exfiltrées" au fur et à mesure ? De fait elles sont remplacées par des "immigrés" (nationaux ou européens le plus souvent) : d'autres jeunes (venus des villes à la recherche d'un territoire d'expérience pour gagner leur autonomie sans entrer dans le mode marchand classique), de retraités à la recherche de leurs racines ou d'un cadre de vie attrayant pour un certain temps, ou de micro-entrepreneurs dans le domaine du tourisme, de l'immobilier ou du travail "à domicile" via les nouvelles facilités d'Internet. Ce n'est pas un cas exceptionnel : le sud de Bali est dans une situation voisine, à l'autre bout du monde. Bien entendu ce mouvement n'a aucune commune mesure avec la "dés-occupation" du territoire qui a affecté les montagnes depuis la fin du XIX siècle, il n'est "correctif" que par rapport aux années 1960, 1970...
Dans certaines communes (dont la mienne) 80 % des "votants" n'habitaient pas la commune vingt ans auparavant. Un nouveau "pacte social" s'est donc institué, de fait, dont personne ne sait aujourd'hui exprimer les contours. Mais il existe.
Peut-être les collectivités locales devraient-elles tendre à le faire s'exprimer davantage en lui donnant les moyens d'une "lisibilité".
Je m'explique : en dehors des zones où l'affichage touristique tend à être dominant (le long des axes principaux de communication) et à occulter tout autre expression, il existe une "Cévennes profonde", où perdure l'image d'une identité culturelle basée sur l'histoire (protestantisme, soie, châtaignier, architectures rurales et industrielles etc.). Cette identité est valorisée, à juste titre, par les acteurs culturels. Mais elle tend constamment à tirer vers le passé une région qui ne parvient pas à mettre en avant ses composantes contemporaines. Si l'on prend la Haute-Savoie, il est manifeste que l'identité "traditionnelle" continue à exister à côté, ou avec, celle des activités sportives, culturelles et économiques contemporaines. Est-ce le "fond" qui manque en Cévennes pour qu'une identité contemporaine s'y exprime ? A côté des alpages savoyards, il y a les stations de ski. A côté des vestiges des filatures, moulinages, bonneteries etc. qui ont fait l'identité industrielle des Cévennes au XIXe siècle, que pouvons-nous proposer qui exprime un "être socio, économique et culturel" dont le nom serait : Cévennes ?
Comment s'identifier à une région et endosser les responsabilités qui devraient être prises quant à son devenir s'il est impossible d'en avoir une représentation contemporaine sur laquelle appuyer une quelconque dynamique ? Autant fonder sur du vide.

lundi 8 mars 2010

Identité nationale ... et guerre (3)



L’identité française ? A la bataille de Valmy, le prince de Condé, Français « de souche » s’il en fût, était du côté prussien. Le nationaliste vénézuélien, Miranda, s’était engagé, lui, du côté du pays de la Révolution. Lequel, ce jour-là, était le plus Français ?
En 1870, Garibaldi, lui aussi, vint mettre son épée au service de la France. Il gagna même une petite bataille alors que le Français « de souche », Bazaine, livrait Metz aux Allemands. Le plus Français des deux ? Bazaine, répondit la droite qui invalida, comme étranger, Garibaldi élu député. En signe de solidarité, Victor Hugo démissionna. En mai 1915, le général Joffre lançait une grande offensive en Artois pour tenter de reconquérir le bassin minier. Echec total. Les vagues d’assaut se brisent sur une triple ligne de défense allemande. 200 000 tués pour rien. Un miracle cependant, un seul : une division du 33ème Corps, en une charge héroïque, irrésistible, drapeau au vent et au cri de « Vive la France ! », franchit tous les obstacles et s’empare de la colline de Vimy qui surplombe la ville de Lens.

Qui sont ces héros ? Les premiers qui tombent sous le feu ennemi s’appellent Ben Smail, Ben Faran ou Bellagh Amar. A leurs côtés, que la mitraille allemande va faucher à leur tour, qui trouve-t-on ? Des volontaires Américains, Espagnols, Canadiens, Italiens, mais aussi et surtout des Tchèques, membres d’associations démocratiques ou progressistes, venus s’engager au nom du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, des mineurs polonais qui, dans un même élan, aspirent à la libération de leur autre patrie et de leur outil de travail, des Russes pour qui la défense de la République française participe de leur combat contre l’autocratisme tsariste. Tombent côte à côte, unis dans le même sacrifice, le brancardier belge Van Mengen, le Grec Théodoraxis, le peintre cubiste tchèque Kupka, le porte-drapeau morave Bezdicek, ou cet escroc polonais au nom imprononçable qui se faisait passer pour un prince. Parmi les survivants, le Suisse Blaise Cendrars qui deviendra le chroniqueur de cette épopée.
C’était cela, ce jour-là, la plus belle France.

Additionnez d’ailleurs l’Italien Lully, l’Allemand Gluck, les Italiens Spontini et Cherubini, le Belge Grétry, les juifs teutons Meyerbeer et surtout Offenbach, le Polonais Chopin, le Suisse Honegger, et vous avez reconstitué le creuset d’où jailli la grande musique française.
De certains peuples, on peut dire que leur religion, leur spécificité ethnique, leur langue, font leur identité. A la question « qu’est-ce qu’un Français ? », hors une Histoire commune, on ne peut quasiment pas répondre, et c’est précisément cette impossibilité qui fait notre identité nationale.
Dimanche 31 Janvier 2010
Jean-François Kahn (voir son blog)

Copyright (illustration) http://warandgame.files.wordpress.com/2008/08/valmy1792.jpg

jeudi 4 mars 2010

Services vitaux rendus par la nature (Agnès Sinaï)



"La valeur des services rendus par les écosystèmes est désormais l’argument clé pour rallier entreprises et Etats à des stratégies de développement qui anticipent la détérioration des ressources naturelles comme un manque à gagner pour les agents économiques. Dès 1997, l’économiste Robert Costanza et son équipe ont évalué à quelque 33.000 milliards de dollars par an (estimation minimale) la totalité des services rendus à l’humanité par les écosystèmes de la planète1.

Cette estimation démontre que la valeur du capital naturel est supérieure au PIB mondial annuel, de l’ordre de 18.000 milliards de dollars par an. Divisés par six milliards d’individus, ces 33.000 milliards offrent environ 5.500 dollars par personne et par an de services offerts par la nature.

Cela n’est pas cher pour ces services vitaux ''rendus'' par les écosystèmes, comme la régulation de la composition de l’atmosphère, du climat, de l’eau, la capacité de résilience, l’offre de ressources en eau, le contrôle de l’érosion, la formation des sols, le recyclage des nutriments, le traitement des déchets, la pollinisation, le contrôle biologique, l’habitat des espèces, la production de nourriture, de matériaux bruts, de ressources génétiques, de divertissement et de support de culture.

Selon M. Khosla, président de l'UICN, dans les cinq prochaines années, l’approche de la biodiversité devrait connaître une refonte totale (en regard de l'échec global de l'objectif 2010 : stopper l'érosion de la biodiversité). La sauvegarde des écosystèmes mobilisera de plus en plus les entités régionales et les pouvoirs décentralisés, en association avec les populations autochtones, qui possèdent une science citoyenne de la biodiversité.

(En effet) selon Robert Kasisi, de l’Ecole d’architecture du Paysage de Montréal, ''biodiversité est un terme qui ne passe pas dans le public. L’approche par la conservation ne tient pas compte de la diversité culturelle des visions du monde''. Comme l’écrivait l’anthropologue Philippe Descola, il y a bien une pluralité des intelligences de la nature. Pour l’éleveur, la forêt, c’est l’obstacle. Pour un Occidental, une table en bois est un objet de décoration. Pour une nomade du Sahel, elle sert à faire du bois de feu. La biodiversité ne se limite donc pas à un inventaire du nombre d’espèces présentes sur la Terre, mais désigne une pluralité d’usages. Ainsi les contes et les chansons Pygmées permettent de comprendre les relations avec la faune en République du Congo."

La valeur "morale" qu'on peut accorder à la préservation de la biodiversité n'empêche pas de prendre en compte aussi sa valeur de service rendu : "L'homme n'est ni ange ni bête" écrivait Pascal, "... et qui veut faire l'ange...". Nous ne vivons pas que de hautes spéculations éthique, il faut donc accepter d'agir à plusieurs niveaux.

« Penser globalement, agir localement » ne suffit plus, il faut aussi penser avec les ressources et représentations intellectuelles locales : par quelle entrée ? Qui s'y jette ?


Photo : http://www.photosapiens.com/IMG/artoff3882.jpg

mardi 2 mars 2010

Michael Kenna


Eblouissante exposition numérique de Michael Kenna sur le site de la BNF (ici l'album "lieux mythiques") avec une intéressante réflexion sur le paysage "traditionnel" mis en perspective avec le cyberspace. Encore un effort pour être moderne...